Impact du véhicule électrique sur le réseau de distribution d’électricité

Contenu mis à jour le 04/12/2020

Cette page a été rédigée par 

la Commission de régulation de l'énergie.

Les premières études menées par les gestionnaires de réseaux sont rassurantes quant à la capacité du système électrique français à faire face au développement à grande échelle des véhicules électriques : en incitant dès à présent aux comportements adéquats, au moment du raccordement de l’infrastructure de recharge et surtout au cours de l’utilisation de celle-ci, les réseaux et le système électrique dans son ensemble seront capables d’accueillir un nombre élevé de véhicules électriques à un coût maîtrisé pour la collectivité.

1. Un enjeu essentiellement en termes de puissance appelée

Selon les études menées par RTE, même dans le scénario haut de développement du nombre de véhicules électriques (15,6 millions de véhicules à horizon 2035), dans un contexte de baisse prévisionnelle de la consommation électrique par ailleurs, le développement de la mobilité électrique ne fait pas craindre de difficulté en termes de consommation d’énergie (la consommation liée à la mobilité est estimée à 35 TWh/an, soit 7 % de la consommation dans le scénario haut à horizon 2035, correspondant ainsi à un simple transfert d’usage), mais pourrait présenter des enjeux en termes de puissance appelée. 

Trajectoires de consommation intérieure d’électricité suivant différents scénarios de développement du parc de véhicules électriques (entre 3,5 et 15,6 millions à horizon 2035) (source : RTE)

Les différentes simulations montrent que si un pilotage est mis en place (60 % du parc piloté, dont la moitié via un signal tarifaire et l’autre moitié via un signal plus fin), le système électrique est alors capable d’absorber cet appel de puissance. En revanche, en l’absence de pilotage, la pointe nationale de 19 h augmenterait de 20 % environ.

Impact du pilotage sur les appels de puissances - simulations avec un parc de 15 millions de VE à horizon 2035, un jour ouvrable de janvier à température de référence (source : RTE)

Les résultats obtenus par Enedis s’agissant de l’impact sur les réseaux de distribution permettent de tirer les mêmes conclusions. Ainsi, Enedis estime que les coûts d’infrastructures de réseaux liés à l’insertion de 9 millions de véhicules sur le réseau public de distribution pourront diminuer de 30 à 35 % en fonction de la mise en place ou non d’un pilotage de la recharge performant.

Les premières analyses réalisées par RTE montrent par ailleurs que les modalités de développement des véhicules électriques pourront aussi contribuer à lisser les appels de puissance liés à la recharge. Ainsi le développement de points de charge sur les lieux de travail participera à la diminution de la pointe du soir liée à la recharge des véhicules électriques. La stratégie de recharge qu’adopteront les utilisateurs (recharge « dès que possible » ou a contrario en fonction de l’état de charge de la batterie) aura un impact sur les appels de puissance, RTE estimant qu’une recharge quand le niveau de la batterie est inférieur à 50 % permettra de diminuer de l’ordre de 40 % la pointe liée à l’électromobilité par rapport à une recharge systématique.

Puissance moyenne soutirée par véhicule sur une semaine moyenne en charge naturelle (i.e. sans système de pilotage de la charge), en fonction des comportements de charge (source : RTE)

Ces études nécessitent d’être approfondies pour inclure éventuellement le développement de véhicules électriques plus lourds (utilitaires et bus par exemple) ou plus légers (deux-roues) ou encore en tenant compte de la recharge en « station-service » sur la voie publique. Néanmoins elles donnent les premières clés d’une insertion réussie des véhicules électriques dans les réseaux, l’enjeu étant d’inciter dès à présent les différents acteurs à adopter les bons réflexes pour se recharger intelligemment.

Par ailleurs les véhicules électriques, utilisés comme source de flexibilité, pourraient même à terme rendre des services au réseau en contrepartie desquels les utilisateurs seront rémunérés, réduisant ainsi le coût d’utilisation d’un VE. La pleine valorisation de ces sources potentielles de valeur, lorsqu’elles existent, est donc aussi un enjeu important pour atteindre les objectifs.

2. Cas des bornes ultra rapides

Les bornes dites « ultra-rapides » génèreront des appels de puissance importants et probablement peu pilotables compte tenu des cas d’usages de ces infrastructures (aires d’autoroutes par exemple). Compte tenu de leur puissance, elles engendreront des coûts de raccordement plus importants qu’il est souhaitable de maîtriser au mieux.

A la demande de la CRE, Enedis a réalisé un premier chiffrage de l’impact de leur développement pour les réseaux électriques. Le scénario étudié par Enedis est le suivant : l’installation sur chacune des 407 stations-service sur autoroute de « stations de recharge » de 5 MW chacune correspondant à plus de 30 points de charge à 150 kW ou d’une quinzaine de points de charge à 350 kW. Ce niveau de puissance nécessite la création d’un départ dédié depuis le poste source le plus proche. Les résultats de l’étude montrent que l’installation d’une telle infrastructure de recharge :

  • dans 80 % des cas, ne nécessite que des travaux de création de lignes ;
  • dans 20 % des cas, nécessite des travaux de renforcement du poste source (ajout ou modification du transformateur associé par exemple) ;
  • pour 4 cas sur 407, nécessite la création de deux postes source.

Au total, le raccordement en HTA des 407 stations-service représenterait un coût global d’environ 470 M€ sur le réseau HTA. Le coût moyen, par aire, des travaux de raccordement s’élèverait donc à 1 M€ environ, avec de fortes disparités entre stations (fourchette comprise entre 50 k€ et 3,35 M€). L’ensemble de ces coûts (coûts de liaisons HTA, coûts de renforcement des postes sources existants, création de postes sources) constituent des coûts d’extension, au sens de l’article D. 342-2 du code de l’énergie, et seront donc à la charge des demandeurs du raccordement après application d’un taux de réfaction qui conduit la collectivité des consommateurs d’électricité à supporter une partie de ces coûts.

Si les futures « stations de recharge » sur autoroute devaient plutôt proposer une puissance totale de 10 MW, il faudrait alors créer 14 postes sources et le coût global passerait à environ 530 M€. À l’inverse, si la puissance était plutôt de 2 MW, aucun poste source ne devrait être créé.

Cette étude nécessite d’être approfondie par Enedis et RTE, notamment pour estimer les impacts sur le réseau HTB : coûts de renforcement induits ainsi que les éventuels coûts de raccordement pour des stations de recharge qui seraient amenées à se raccorder en HTB.

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