Les smart microgrids

Contenu mis à jour le 30/11/2020

1. Des micro-réseaux intelligents

Le développement futur du système électrique devrait conduire à privilégier le déploiement des technologies de Smart grids, notamment pour en réduire le coût. Rendre les réseaux électriques intelligents consiste, en grande partie, à les instrumenter pour les rendre communicants et pilotables à distance. L’intégration des technologies de l’information et de la communication aux réseaux les rend communicants et permet de prendre en compte les besoins des acteurs du système électrique, tout en assurant un acheminement d’électricité plus efficace, sûr et économiquement viable.

Le réseau de transport est déjà instrumenté, notamment pour des raisons de sécurité d’approvisionnement. En revanche, les réseaux de distribution sont encore peu dotés en technologies de la communication, en raison du nombre très important d’ouvrages (postes, lignes, etc.) et de consommateurs raccordés à ces réseaux. L’enjeu des Smart grids se situe donc principalement au niveau des réseaux de distribution, c’est-à-dire précisément à l’échelle des microgrids. Sous l’effet des nouvelles politiques de transition énergétique et de la révolution numérique, des microgrids intelligents, des micro-réseaux qui intègrent les technologies de l’information et de la communication des Smart grids, remplacent l’approche traditionnelle au microgrid. Les « simples » microgrids deviennent aujourd’hui des Smart microgrids.

Auparavant, l’équilibre du système électrique était obtenu principalement en pilotant l’offre d’énergie en fonction de la demande, aux meilleures conditions d’approvisionnement et de coûts. Aujourd’hui, la nouvelle donne énergétique ne permet plus de gérer le système électrique de cette façon. L’ajustement qui permet d’équilibrer le système électrique se fait non seulement par l’offre mais aussi par la demande. La gestion des réseaux jusqu’à présent centralisée et unidirectionnelle allant de la production à la consommation devient progressivement répartie et bidirectionnelle. La solution qui consisterait à ne faire que renforcer les réseaux est sous-optimale et difficilement réalisable, eu égard à la difficile acceptabilité des nouvelles infrastructures et aux coûts importants des investissements à consentir. Les Smart microgrids peuvent ainsi constituer une importante opportunité pour certains territoires. Les technologies Smart grids associées au concept de microgrids sont à même d’aider les gestionnaires de réseaux à s’adapter aux défis de la production décentralisée d’énergie, notamment en considérant ces nouveaux micro-réseaux intelligents comme un outil de flexibilité.

2. Un outil de flexibilité

Les microgrids facilitent l’intégration des énergies de sources renouvelables sur le réseau, qui, du fait de leur intermittence, pourraient compliquer le maintien d’un niveau de fréquence et de tension suffisant. Les microgrids capables de se déconnecter du réseau de distribution peuvent contribuer à maintenir cet équilibre en fonctionnant comme une centrale virtuelle L’association de la production et de la demande d’électricité génère une capacité nette de production ou d’absorption sur les réseaux. Ainsi considérés, les microgrids agissent comme des outils de régulation de la fréquence et de la tension.

Dans cette optique, les microgrids d’aujourd’hui, les Smart microgrids sont d’autant plus intéressants qu’ils seront de plus en plus conçus pour être capables de fonctionner de manière îlotée. En pleine transition énergétique, la notion d’îlotage est éminemment liée à celle d’autoconsommation. En choisissant de consommer sa propre production d’électricité, non seulement l’utilisateur diminue les pertes techniques liées au transport d’électricité, mais qui plus est, il consomme la production d’électricité de source renouvelable avant qu’elle ne crée des déséquilibres. De cette manière, un microgrid peut être assimilé à une boucle locale d’énergie incorporant des installations de production d’électricité d’origine renouvelable associées à des équipements de stockage. La production et la consommation d’électricité se compensant à l’échelle locale, aucun problème d’équilibre n’apparaît dans cette zone à la maille nationale.

La maille du microgrid est particulièrement pertinente dans la mesure où elle permet de combiner des usages et besoins différents (école, salles de sports, logements, bureaux, commerces, équipements sur la voie publique etc.) et de bénéficier de cette mutualisation pour mieux équilibrer le réseau de distribution d’électricité et des besoins particuliers. De même, le potentiel d’effacement à l’échelle du microgrid se révèle alors d’autant plus grand que les usages sont diversifiés.

Les microgrids apportent ainsi un service auxiliaire au réseau de distribution en l’aidant à tenir la stabilité de sa tension et en l’allégeant lorsqu’il est déconnecté du réseau.

3. Des micro-réseaux au service de la transition énergétique

Face aux préoccupations environnementales croissantes, l’Union Européenne avait adopté des objectifs ambitieux, dits des « 3 × 20 ». Dans le prolongement de cette politique européenne, la France a adopté, par les lois issues du Grenelle de l’environnement, des mesures vidant notamment à maîtriser la demande en énergie. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a, encore, rehaussé les ambitions de la France. Elle prévoit, notamment, la réduction de la consommation énergétique finale de 50 % en 2050, par rapport à 2012, avec un objectif intermédiaire de 20 % en 2030, ainsi que la diminution des émissions de gaz à effet de serre de 40 % en 2030 par rapport à 1990. Le projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit 74 GW de production d’électricité renouvelables installées en 2023, soit 50% de plus qu’en 2017, et 102 à 113 GW installés en 2028. La PPE prévoit aussi 65 0000 à 100 000 sites photovoltaïques en autoconsommation en 2023.

Sans solutions de stockage de la production d’électricité d’origine renouvelable, les groupes électrogènes demeurent indispensables au fonctionnement d’un microgrid îloté. La problématique des Smart microgrids est fondamentalement liée à celle du stockage. De nouvelles technologies sont actuellement testées dans de nombreux démonstrateurs : stockage stationnaire au niveau des différents nœuds du réseau ou des bâtiments, stockage mobile à travers les véhicules électriques, stockage associant réseaux électriques et gaziers par l’injection d’hydrogène issu de l’électrolyse, etc. À titre d’exemple, le projet Kergrid en Bretagne a consisté à construire un bâtiment tertiaire intégrant de la production d’électricité renouvelable et du stockage d’énergie. Ce bâtiment à énergie positive fonctionne comme un microgrid. Le coût du stockage ne cesse de baisser, rendant cette solution de plus en plus compétitive. Des progrès significatifs sont encore envisageables à moyen terme grâce aux travaux de recherche et développement sur les batteries, les volants d’inertie et le stockage thermique.

Kergrid

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La transition énergétique a fait naître, pour de nombreux territoires, la volonté de se réapproprier leurs ressources énergétiques et leur gestion. Pour ces territoires, les microgrids sont l’assurance de pouvoir compter sur un réseau local plus fiable et plus sûr en cas d’incident en amont de ce réseau, sur le réseau de transport ou de distribution d’électricité. La possibilité de s’îloter en se déconnectant du réseau national est un moyen totalement efficace d’empêcher le risque de contagion et de rupture d’approvisionnement. À l’inverse, si un incident se produit sur le microgrid, il peut s’appuyer sur le réseau national pour assurer son alimentation en électricité. Un microgrid doit toujours être considéré dans une approche de complémentarité au réseau public.

Le stockage d'électricité

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Si certains territoires manifestent un intérêt croissant pour les microgrids, c’est aussi parce qu’ils comprennent souvent une dimension sociétale, qui repose sur l’implication des consommateurs. La transition énergétique et la modernisation des réseaux qu’elle entraîne transforment le consommateur en consomm’acteur, qui devient autonome dans ses choix. Ceci va de pair avec l’impulsion donnée à la production décentralisée d’énergie. L’intérêt des microgrids est de placer la réflexion sur la politique énergétique des territoires à l’échelon local et de permettre à la population de développer une meilleure compréhension des enjeux liés à la transition énergétique sur leur territoire, selon ses caractéristiques propres. La notion de consomm’acteur s’est développée à la faveur de la diffusion du concept de développement durable. Elle recouvre, notamment, des aspects de responsabilité sociale du consommateur-citoyen.

Le développement de la production d’électricité distribuée place le consommateur en situation de production d’énergie. Dans un contexte de croissance de la pointe de consommation, les consommateurs ont aussi un rôle majeur à jouer dans la maîtrise de la demande. Ceci est d’autant plus vrai pour les utilisateurs d’un microgrid, qui sont au cœur du système de pilotage de la demande en électricité qui comprend des outils tels que les compteurs évolués Linky, des solutions de domotique, de stockage etc. L’essor de nouveaux usages comme la mobilité électrique et la valorisation des données générées par les compteurs évolués contribuent également à renforcer le rôle du consommateur, qui plus est dans un microgrid. L’utilisateur peut décider de déplacer sa consommation d’électricité aux moments les plus opportuns, en fonction de l’état du réseau ou de signaux de prix : sa facture d’énergie s’en trouve allégée.