Pourquoi un registre de gestion des capacités d’injection de biométhane ?

Contenu mis à jour le 01/12/2020

Cet article a été rédigé par Teréga.

Grâce à une production décentralisée d’énergie, la filière de production de biométhane permet de répondre à une partie des consommations locales. Cette organisation comporte toutefois une contrainte : la production de biométhane, à moins d’investir dans des ouvrages de renforcements permettant d’augmenter les capacités d’accueil sur une zone, doit être consommée dans la zone où elle est injectée, appelée « zone d’injection ». 

En effet, les équipements techniques (postes de détente) à l’interface entre le réseau de transport principal et le réseau régional ou entre le réseau régional et le réseau public de distribution ne permettent pas, aujourd’hui, au gaz de « remonter » vers les réseaux situés en amont, à moins que les conditions technico-économiques sur la zone d’injection justifient la réalisation d’ouvrages de rebours.

Cependant, même dans le cas où un ouvrage de renforcement est réalisé, les capacités d’injection de biométhane dans un réseau de gaz naturel risquent donc d’être limitées, tout du moins à titre transitoire, tout particulièrement en été lorsque les consommations sont relativement faibles.

Selon la procédure rédigée par un groupe de travail intitulé « Injection biométhane », qui réunit les différents représentants de la filière biométhane, notamment les producteurs et opérateurs de réseaux, une zone d’injection est constituée d’un réseau de transport régional et des zones de distribution en aval qui y sont raccordées.

Schéma d’une zone d’injection (Source : Teréga)

Le schéma, volontairement très simplifié, présenté ci-dessus permet de comprendre les flux possibles pour ce biométhane injecté. Pour un producteur raccordé au réseau de distribution, sa production ne pourra être consommée que par les clients alimentés depuis le réseau public de distribution alors que pour un producteur raccordé au réseau de transport sa production pourra desservir aussi bien les consommateurs raccordés directement au réseau de transport (industriels) que les consommateurs alimentés par toutes les réseaux publics de distribution raccordés à ce même réseau de transport.

En conséquence, en fonction de la saison, des types de réseaux auxquels seront raccordés les sites de méthanisation, du nombre de ces dernières, et des ouvrages de renforcements réalisés sur ces réseaux, il y a un risque de saturation des capacités disponibles pour l’injection de biométhane.

En outre, les perspectives de développement de la filière biométhane, ainsi que les objectifs fixés par le projet de PPE mis en consultation en janvier 2020, laissent entrevoir une saturation des réseaux de gaz naturel dans lesquels seront injectées les productions de biométhane. 

Pour ces différentes raisons, il a donc été nécessaire de définir des règles de priorité qui s’appliquent lorsque plusieurs projets souhaitent se raccorder sur une même zone et sont en « concurrence » pour l’obtention des capacités d’injection de la zone, que ce soit de manière pérenne, ou transitoire en attendant les travaux de renforcements.

Le groupe de travail « Injection biométhane », instance de concertation qui réunit les principaux acteurs de la filière, a rédigé et proposé à la CRE une procédure de gestion des réservations de capacité d’injection de biométhane dans les réseaux de gaz naturel. Cette procédure, publiée sur les sites internet des opérateurs de réseaux, prévoit la création d’un registre de gestion des capacités. Sur ce registre seront inscrits les projets en fonction de leur ordre d’arrivée avec attribution d’un numéro d’ordre qui permettra de prioriser, le cas échéant, les allocations de capacité d’injection.

Les principales règles de la procédure portent sur :

  • la règle du « premier arrivé, premier servi » ;
  • la définition de la zone d’injection de biométhane ;
  • la définition d’une fonction de gestionnaire de registre des capacités d’injection de biométhane ;
  • les modalités et délais d’échanges d’informations entre les acteurs ;
  • l’initialisation des files d’attente avec les projets déjà en cours d’instruction par les gestionnaires de réseaux.

Cette procédure définit les rôles des différents acteurs, ainsi que les règles de priorité lors du raccordement d’une installation d’injection de biométhane aux réseaux de gaz naturel. Les acteurs sont de 3 types, les gestionnaires de réseaux de transport, les gestionnaires de réseaux de distribution et les porteurs de projet ou producteurs de biométhane, qui sont à l’origine des informations qui vont être saisies et enregistrées dans le registre. La procédure crée également une nouvelle fonction, celle de gestionnaire de registre.

1. Le métier de gestionnaire de registre

La mission de gestionnaire de registre consiste à assurer la gestion des réservations et des allocations des capacités d’injection et permettra une harmonisation des pratiques de mise en œuvre de la procédure.

Le groupe de travail a proposé que le rôle de gestionnaire de registre soit assuré par les gestionnaires de réseaux de transport de gaz naturel qui disposent, par définition, de la vision globale des consommations sur les zones d’injection. En effet, ils connaissent les consommations des clients industriels raccordés à leur réseau de transport régional et les volumes livrés à chaque poste de distribution publique pour les consommations de gaz naturel des clients raccordés aux réseaux publics de distribution. Ils pourront donc s’assurer que les allocations de capacité d’injection ne sont pas supérieures aux limites des capacités d’absorption de la zone.

Cette disposition a été validée par la CRE dans sa délibération du 24 avril 2014 qui portait sur l’ensemble des modalités d’établissement de la procédure de gestion des réservations de capacité d’injection de biométhane.

Ainsi, Teréga et GRTgaz sont gestionnaires de registre, chacun pour les zones d’injection situées sur leur réseau.

2. Le fonctionnement du registre

Les porteurs de projet se rapprochent du gestionnaire de réseaux sur lequel ils envisagent que soit raccordé leur projet. Ils définissent leur besoin et les différents éléments qui devront être renseignés dans le registre (débit de production envisagé, localisation, date de mise en service, régime administratif, etc.)

Les gestionnaires de réseaux ont la responsabilité de demander l’inscription sur le registre des projets déclarés sur leur réseau ainsi qu’une réservation de capacités et de renseigner le registre des éléments d’information qui jalonnent la vie du projet depuis son initiation jusqu’à sa mise en service.

Le gestionnaire de registre valide les déclarations des projets, ainsi que les réservations de capacités demandées par les gestionnaires de réseaux et confirme les enregistrements des différentes phases d’avancement déclarées par les gestionnaires de réseaux durant la vie des projets. Il est le garant de la bonne tenue du registre des capacités selon des règles de gestion transparentes et non-discriminatoires entre porteurs de projets sur les différents réseaux et de la confidentialité des informations transmises.

Dès lors qu’un projet a été déclaré et que le gestionnaire de registre a validé son enregistrement, les quantités réservées intègrent une « file d’attente » jusqu’à ce que l’installation de production de biométhane soit mise en service et que ces quantités soient allouées.

Une fois passée l’étape initiale d’enregistrement du projet, les acteurs devront communiquer et déclarer son état d’avancement. En effet, la procédure définit un certain nombre de jalons avec des échéances à respecter sous peine que le projet soit sorti de la file d’attente. Les différentes informations concernant le franchissement des étapes administratives et contractuelles doivent être enregistrées et validées par le gestionnaire de registre afin que le projet soit maintenu dans le registre.

Procédure de gestion du Registre de capacités (Source : CRE)

Lorsqu’un projet déclaré dans le registre, compte tenu de la capacité disponible sur une zone d’injection, ne peut se voir attribuer toute la capacité réservée, le différentiel est alors qualifié de reliquat de capacité. Ce reliquat est automatiquement inscrit dans le registre et, en cas d’augmentation de capacité (augmentation de la consommation de la zone) ou de relâchement de capacité (sortie d’un projet de la file d’attente), les nouvelles capacités disponibles seront attribuées aux projets en fonction de leur numéro d’ordre.

Sur la base des éléments exposés précédemment, le registre de gestion des capacités d’injection a été initialisé durant l’été 2014 par Teréga et GRTgaz. Au 1er octobre 2019, le registre comporte en cumulé environ 1000 projets inscrits pour une capacité réservée d’un peu plus de 20 TWh.

La question du rebours