Le contexte énergétique allemand
L’Energiewende allemand ou le choix du tournant énergétique
Le 28 septembre 2010, le gouvernement fédéral allemand a adopté une nouvelle stratégie énergétique – l’« Energie Konzept 2050 », qui constitue le fondement des orientations de la politique énergétique allemande d’ici 2050. Dans ce document, le gouvernement fédéral s’est fixé des objectifs ambitieux en matière de politique énergétique et climatique :
- diminuer d’au moins 80 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990 ;
- faire des énergies renouvelables la principale source d’approvisionnement en énergie du pays : elles devront représenter 60 % de la consommation d’énergie finale et 80 % de la production électrique en 2050 ;
- faire baisser significativement la consommation d’énergie et améliorer l’efficacité énergétique.
En outre, ce texte prévoit la prolongation de l’exploitation des centrales nucléaires pour une durée de 14 ans pour les centrales les plus récentes et 8 ans pour les plus anciennes.
A la suite de la catastrophe de Fukushima en mars 2011, le gouvernement fédéral allemand a réévalué les risques posés par l’énergie nucléaire et a confirmé le choix de sortie du nucléaire qui avait déjà été évoqué quelques mois auparavant. Dans ce cadre, le gouvernement fédéral, le Bundestag (Parlement) et le Bundesrat (Conseil fédéral représentant les 16 régions allemandes « Länder ») ont adopté un « paquet législatif énergie » comprenant onze textes sur :
- la sortie accélérée du nucléaire d’ici 2022 : dès 2011, les sept plus vieilles centrales nucléaires ainsi que la centrale de Krümmel ont été mises à l’arrêt. Les neuf centrales restantes, qui produisaient encore 18 % de l’électricité du pays en 2011, seront progressivement arrêtées d’ici 2022 au plus tard. La sortie du nucléaire en Allemagne, qui correspond à un passage de 25 % à 0 % de la part du nucléaire dans le mix énergétique, représentera le même effort pour la France, qui a pour objectif une baisse du nucléaire de 75 % à 50 % en 2025 ;
- le développement des énergies renouvelables : l’éolien, l’hydraulique et le solaire, continueront à être développées. En 2011, elles fournissaient 20 % de l’électricité. Cette part doit être portée à 35 % d’ici 2020 et à 80 % d’ici 2050 ;
- les sources de production flexibles : les centrales thermiques modernes à charbon et à gaz doivent servir d’ « énergie de transition » afin d’atteindre l’ère du renouvelable à moindre coût, tout en assurant la sécurité énergétique du pays ;
- et le développement accéléré du réseau.
Pour en savoir plus :
Vote des lois du paquet énergie, Bilan des conséquences de l’accident de Fukushima sur la politique énergétique allemande, « Info Berlin N°11 – Août 2011 »
Note de synthèse - Stratégie énergétique allemande : points clefs – Bureau de coordination énergie éolienne
Une transition énergétique qui se fait dans un contexte contraint
Comme la majorité des États européens, l’objectif de l’Allemagne est de réaliser cet Energiewende tout en assurant un approvisionnement énergétique fiable, une relative stabilité des prix de l’énergie, en préservant la compétitivité industrielle du pays et en répondant aux objectifs climatiques élaborés par l’Union européenne et, ce, en dépit de l’augmentation de la consommation d’énergie, de la crise économique et financière, de l’augmentation des prix de l’énergie.
L’arrêt du nucléaire en Allemagne a pour conséquence de réduire de 8,3 GW la capacité électrique disponible pour le pays. Cette capacité ne pourra pas être immédiatement compensée par les installations de production d’électricité renouvelable, car leur construction nécessitera du temps. La capacité nucléaire arrêtée sera principalement compensée par les centrales existantes et par les importations. En effet, l’Allemagne dispose de réserves de capacité très supérieures à celles supprimées, puisque la puissance appelée à la pointe ne dépassait pas, en 2009, 80 000 MW (102 100 MW en France, le 8 février 2012) alors que sa capacité installée atteignait 147 000 MW (128 380 MW en France, à fin 2012), dont une puissance de 85 000 MW garantie (116 300 MW en France), c’est-à-dire pouvant délivrer du courant à tout instant sur requête du gestionnaire du système. La difficulté est que ces capacités sont majoritairement fournies par des centrales de production au fioul et au charbon, très polluantes.
L’une des clés de cette équation compliquée pourrait donc être le renforcement des mesures en faveur de l’efficacité énergétique, par la réduction de la consommation, notamment grâce aux technologies de Smart grids (compteurs évolués, bâtiments intelligents, etc.).