Introduction : l’énergie durable, la clé de l’accès universel a l’électricité

Contenu mis à jour le 07/12/2020

Cette section a été rédigée

par la Commission de régulation de l'énergie.

En Afrique subsaharienne, le taux d’électrification est en moyenne de 32% en raison de capacités installées de production d’électricité insuffisantes et d’un faible accès à l’énergie dans les régions non raccordées aux réseaux. Toutefois, si l’approvisionnement énergétique du continent est limité, ses ressources énergétiques sont considérables, avec 10 TW de potentiel solaire, 350 GW d’hydroélectricité et 110 GW d’éolien. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) considère que la moitié de la croissance de la production électrique en Afrique d’ici 2040 pourrait venir des énergies renouvelables. L’énergie solaire en particulier, par sa capacité à fonctionner hors réseaux, peut fortement contribuer à électrifier les territoires ruraux isolés.

1. L’enjeu de l’accès à l’énergie

Une électricité rare et chère

L’électricité en Afrique constitue un besoin considérable. Aujourd’hui 14% de la population mondiale n’a pas accès à l’électricité, en majorité des populations rurales (87%). Sur le milliard de personnes concernées dans le monde, 645 millions de personnes vivent en Afrique subsaharienne. L’accès à l’électricité dans cette région est en effet le plus faible du monde, autour de 32% d’après la Banque africaine de développement. De plus, si l’accès à l’énergie progresse dans le reste du monde, l’évolution est négative en Afrique : la croissance démographique étant plus rapide que le rythme auquel la population accède à l’électricité, le nombre de personnes privées d’accès continue d’augmenter

« Energie solaire en Afrique : un avenir rayonnant », 2019, Institut Montaigne : www.institutmontaigne.org/ressources/pdfs/publications/energie-solaire-en-afrique-un-avenir-rayonnant-note.pdf

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Figure 1 - Taux d’accès à l’électricité en Afrique subsaharienne (2015, répartition par région)

De la même manière, la consommation d’électricité par habitant est particulièrement faible en Afrique subsaharienne, où elle représente 181 kWh/an/personne, alors qu’elle est de 744 kWh/an/personne en Inde, 2462 kWh/an/personne au Brésil, 6500 kWh/an/personne en Europe et de 13000 kWh/an/personne aux Etats-Unis

Banque africaine de développement : www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Generic-Documents/Bank_s_strategy_for_New_Energy_on_Energy_for_Africa_EN.pdf

. Cet approvisionnement en électricité limité freine la croissance économique du continent, la création d’emplois et les investissements.

De plus, les capacités installées en Afrique reposent principalement sur des moyens thermiques (charbon, gaz, diesel) ou hydroélectriques (barrages), qui peuvent être sous-dimensionnés, vétustes, ou manquer d’entretien. La capacité installée en Afrique est d’environ 168 GW, dont 46 GW en Afrique subsaharienne hors Afrique du sud, pour un milliard d’habitants.

« Energie solaire en Afrique : un avenir rayonnant », 2019, Institut Montaigne : www.institutmontaigne.org/ressources/pdfs/publications/energie-solaire-en-afrique-un-avenir-rayonnant-note.pdf

Figure 2 – Répartition de la capacité installée en Afrique, par source et par région
Figure 3 – Evolution de la capacité installée en Afrique subsaharienne

Les investissements nécessaires requis sont donc particulièrement conséquents dans le secteur de la production électrique et les Etats concernés devront s’appuyer sur l’aide au développement et les investissements privés.

Par ailleurs, le coût de l’électricité en Afrique subsaharienne est particulièrement important. Les tarifs pratiqués sont élevés avec un tarif moyen de 13 à 14 centimes d’euro par kilowattheure, soit trois fois supérieur aux tarifs en Asie du Sud établis autour de 4 centimes d’euros. Le paiement de l’électricité représente 30% du revenu d’une famille vivant dans une grande ville d’Afrique, alors que les coupures d’électricité sont fréquentes.

Une explication de ces prix élevés est que les réseaux africains conçus pour une faible demande sont de petite taille et ne permettent pas de réaliser des économies d’échelle. Les industriels grands consommateurs sont peu nombreux, le recouvrement des factures des usagers résidentiels est fragile, et les pertes techniques ou non-techniques sont importantes, ce qui est répercuté dans les tarifs

www.jeuneafrique.com/239461/economie/electricite-pourquoi-les-africains-paient-ils-si-cher/

. Face à ces difficultés, pour pallier l’absence d’accès à l’électricité, les populations font appel à des solutions de substitution, comme des groupes électrogènes qui produisent une électricité plus chère que les infrastructures dédiées.

L’enjeu du raccordement au réseau national

Le faible accès à l’électricité en Afrique subsaharienne est étroitement lié à l’insuffisance des infrastructures de réseaux. En Afrique aujourd’hui, les réseaux d’électricité sont en développement et une grande partie des zones rurales subsahariennes n’est pas encore raccordée aux infrastructures nationales.

Ce maillage partiel du territoire s’explique notamment par des tarifs qui ne recouvrent pas les coûts de production de l’électricité dans la majorité des pays africains, ce qui ne permet pas d’assurer la maintenance du système électrique ou de réaliser les investissements nécessaires pour répondre à la hausse de la demande. L’Etat finance souvent le déficit de la compagnie d’électricité nationale, et donc une part importante du coût de la production d’électricité, mais en cas de difficulté budgétaire le secteur énergétique est fragilisé.

D’autres facteurs compliquent la réalisation des projets d’infrastructures en Afrique subsaharienne : risque politique, coûts de mobilisation des financements, faiblesses des réseaux électriques existants, déficit de capacité de maîtrise d’ouvrage, manque de formation des institutions locales, lacunes des régimes réglementaires, manque de planification, faible liquidité du secteur financier, solidité financière des contreparties

« Energie solaire en Afrique : un avenir rayonnant », 2019, Institut Montaigne : www.institutmontaigne.org/ressources/pdfs/publications/energie-solaire-en-afrique-un-avenir-rayonnant-note.pdf

. Ces difficultés freinent le développement des réseaux nationaux qui restent limités aux grands espaces urbains.

L’Afrique connait donc deux grandes difficultés : l’insuffisance de ses capacités installées qui ne permettent pas de fournir l’énergie en quantité suffisante pour répondre à la demande croissante de sa population en croissance ; et la faiblesse de l’accès à l’électricité des populations rurales essentiellement qui habitent dans des régions que le réseau national n’atteint pas.

2. Le potentiel de l’Afrique en énergies renouvelables

Les opportunités des énergies renouvelables

Si l’approvisionnement énergétique de l’Afrique est limité, ses ressources énergétiques sont considérables. Le continent possède un potentiel solaire supérieur à 10 TW en raison d’un taux d’ensoleillement parmi les plus élevés du monde dans la région subsaharienne, ainsi qu’un potentiel de 350 GW d’hydroélectricité, 110 GW d’éolien, et 15 GW de potentiel géothermique, en plus du charbon et du gaz déjà exploités.

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) considère que la moitié de la croissance de la production électrique en Afrique d’ici 2040 pourrait venir des énergies renouvelables, et l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) précise qu’au moins 300 GW pourraient être mis en service à partir de sources d’énergie renouvelable d’ici 2030[2]. Actuellement l’Afrique possède une capacité installée d’énergies renouvelables de 34 GW

« Rapport. Initiative africaine pour les énergies renouvelables », MTES - www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Rapport_ENR_Afrique.pdf

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Les énergies renouvelables ouvrent ainsi de nouvelles opportunités pouvant apporter deux types de réponses aux difficultés identifiées : l’intégration de nouvelles capacités de production d’électricité dans les réseaux ; et la distribution de solutions individuelles aux usagers des zones isolées afin de répondre aux besoins d’électrification de ces régions non raccordées au réseau. La production décentralisée à partir d’énergies renouvelables offre des modes d’électrification différents et complémentaires utiles pour répondre au défi de l’accès à l’électricité des populations d’Afrique subsaharienne.

Focus sur l’énergie solaire

L’énergie solaire est aujourd’hui une solution attractive en raison de sa compétitivité grandissante et de sa simplicité de fonctionnement permettant une construction et une maintenance facile. L’un des atouts de l’énergie solaire est de pouvoir fonctionner aussi bien connectée au réseau qu’hors réseau, cette dernière capacité étant clé car elle permet d’alimenter rapidement des populations rurales isolées qui ne sont alors plus obligées d’attendre le déploiement du réseau national généralement long et coûteux.

L’énergie solaire peut-être ainsi exploitée en Afrique sous deux formes :

  • « On-grid » (c’est-à-dire connecté au réseau) :
  • Par des grandes fermes solaires à proximité des centres urbains, afin de produire des quantités conséquentes d’électricité pouvant être distribuées à travers les réseaux existants.
  • « Off-grid » (c’est-à-dire hors réseau) :
  • Par des kits individuels, destinés aux populations des zones rurales non connectées au réseau et aux populations souffrant des défaillances du réseau. Ces kits solaires permettent de couvrir des besoins simples comme la recharge d’un téléphone portable, l’éclairage, une télévision, et dans le cas des kits intermédiaires le fonctionnement d’appareils nécessitant une puissance plus importante comme un congélateur, un convertisseur, un ordinateur, ouvrant la voie à la création de TPE (très petites entreprises).
  • Par des micro-réseaux, isolés du réseau électrique national et fonctionnant grâce à un moyen de production propre d’origine renouvelable, thermique ou hybride. Un microgrid peut relier plusieurs points de consommation, par exemple au sein d’un village ou entre plusieurs villages. Certains micro-réseaux peuvent à terme être raccordés au réseau national.

D’après la Banque africaine de développement, quasiment 70% de la production électrique future sera issue de solutions hors-réseaux ou des mini-réseaux en Afrique subsaharienne, dont deux-tiers à partir d’énergies renouvelables

« Energie solaire en Afrique : un avenir rayonnant », 2019, Institut Montaigne : www.institutmontaigne.org/ressources/pdfs/publications/energie-solaire-en-afrique-un-avenir-rayonnant-note.pdf

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Par conséquent, la réponse aux besoins en électricité du continent africain réside en grande partie dans son potentiel en énergies renouvelables, notamment solaire, qui, conjuguées avec l’énergie conventionnelle, doivent permettre d’augmenter la production nationale et d’électrifier les territoires non raccordés au réseau national.

L’enjeu du financement

Si les solutions à partir d’énergies renouvelables deviennent de plus en plus abordables, les clients mobilisant difficilement des financements font appel à des solutions de substitution plus attractives car plus accessibles, tels que les groupes électrogènes. Ce n’est qu’à l’usage que ces solutions apparaissent plus chères que les solutions renouvelables. Cette question d’arbitrage entre court et long terme se pose de la même manière au niveau de l’Etat dont les réserves monétaires ne permettent pas nécessairement de favoriser la technologie la plus rentable sur le long terme qu’est le renouvelable.

Face au besoin de financement du développement de ces énergies durables, des engagements ont été pris au niveau international pour accompagner la transition énergétique de l’Afrique et les systèmes intelligents sont désormais mentionnés dans les nouvelles initiatives.

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« Energie solaire en Afrique : un avenir rayonnant », 2019, Institut Montaigne : www.institutmontaigne.org/ressources/pdfs/publications/energie-solaire-en-afrique-un-avenir-rayonnant-note.pdf


(2) « Africa 2030 : Roadmap for a renewable energy future », 2015, IRENA

L’apparition discrète des smart grids en Afrique